mercredi 28 avril 2010

Polémique : les patrons étrangers sont-ils trop nombreux ?

De Jeune Afrique/Par Christina Lionnet
Commenté par Patrick N
Apparemment, certains Camerounais se plaignent du grand nombre de dirigeant étrangers au pays.

Il y a trop d’étrangers à la tête des grandes entreprises du pays. C’est l’avis du député d’opposition Jean Michel Nintcheu (Front social démocrate, SDF), qui, mi-mars, a déposé une proposition de loi visant à instaurer la préférence nationale dans le recrutement des dirigeants et du personnel des grandes entreprises. Camrail, Camair-Co, Campost, Socapalm, Heveca, Cimencam, « et j’en passe » ; la liste dressée par le député est longue. Elle relève, selon lui, d’une « ségrégation quasi institutionnalisée » dont sont victimes les élites camerounaises.

(…)Surfant sur la grogne générée par la présence d’étrangers aux postes clés au Cameroun, Jean Michel Nintcheu­ remet au goût du jour le thème populiste­ de la préférence nationale. Manœuvre électorale à l’approche du scrutin présidentiel de 2011 ? « Question de bon sens, rétorque-t-il. Aujourd’hui, plus de la moitié des sociétés camerounaises réalisant un chiffre d’affaires de plus de 20 milliards de F CFA [30,5 millions d’euros, NDLR] par an sont dirigées par des personnes n’ayant pas la nationalité camerounaise. On confie des entreprises stratégiques à des directeurs généraux étrangers au motif qu’ils sont plus compétents que nos compatriotes. Pourtant, ces derniers sortent, eux aussi, des meilleures écoles de France ou des États-Unis ! »

(…)Chantal Eloundou, responsable du bureau des cadres au Fonds national de l’emploi (FNE) à Yaoundé, se réjouit de cette proposition de loi. Elle déplore la priorité trop souvent donnée aux étrangers : « Il faut donner des opportunités aux Camerounais, car ils sont les mieux placés pour sauvegarder les intérêts du pays. D’ailleurs, pour ce qui est des directeurs généraux, on sait bien que la nomination d’étrangers n’est pas un gage d’efficacité. Au Cameroun, on a de l’excellence, on a du potentiel, il faut s’en servir ! »

(…)Pour Jean-Pierre Okalla Ahanda, créateur du cabinet de conseil Okalla Ahanda & Associés, « le diplôme ne compte que pour un tiers dans les compétences. Pour gérer une entreprise, il faut d’autres capacités, forgées au cours d’un cursus. C’est là que le bât blesse. La progression des carrières n’est pas rationnelle. J’accuse moins les diplômes que les ­passe-droits, les “promotions canapés” et tout ce qui fait que les entreprises ne produisent plus assez de gens de grande valeur », sans compter l’interférence de la politique dans le management, « qui laisse souvent penser qu’un Camerounais résistera moins bien aux pressions politiques ou corruptrices qu’un étranger. Il faudrait donc revenir à une culture de la performance. Mais pour cela, il faudrait une révolution ! » s’exclame Jean-Pierre Okalla Ahanda. Faute de quoi ce n’est pas une loi qui, selon lui, réglera le déséquilibre, et, en tout cas, pas la proposition de loi de Jean Michel Nintcheu, qu’Okalla Ahanda estime inapplicable, notamment pour les firmes étrangères. « Vous imaginez des Américains qui voudraient acheter une société locale et à qui on dirait : “Vous ne pouvez pas choisir vos dirigeants” ? Ce serait rédhibitoire. »

Même son de cloche du côté du Groupement interpatronal du Cameroun (Gicam). « Cette proposition de loi est une anecdote, estime Olivier Behlé, président du syndicat patronal. Je n’imagine pas un instant que des députés puissent l’adopter, alors que nous sommes dans une phase de recherche d’investissements. C’est contraire à la libéralisation de la gestion, comme au sens de l’Histoire ! » S’il semble difficile d’imposer aux entreprises et aux investisseurs étrangers la nationalité de leurs directeurs, serait-il envisageable en revanche d’instaurer un quota de personnel local, notamment chez les cadres ? « Cette disposition en faveur des nationaux existe déjà dans la législation, souligne Noé Momha, spécialiste du droit des entreprises à Cameroun Audit Conseil (CAC). Quand une entreprise étrangère veut recruter, elle doit soumettre au ministère du Travail un organigramme de la société, qui décrit la
distribution des postes en termes de “nationaux” ou d’“étrangers”. Le dossier peut théoriquement être rejeté. Le problème est que, dans la pratique, c’est rare. Si les textes existants étaient appliqués, la dérive actuelle n’existerait pas. » [Lire en intégralité sur Jeune Afrique.com]
Quelques éléments importants à garder en esprit :
1- Toute entreprise a pour objectif de faire du profit
2- Le poste de directeur ne s’obtient pas avec le diplôme, mais avec l’expérience
3-Les entreprises énumérées ci-dessus sont des entreprises parapubliques et la part des étrangers représentant souvent près de la moitie du capital
4-Pouvez-vous énumérez 10 noms de personnes qui de part leurs expérience ailleurs et au Cameroun sont capables de gérer efficacement la Camair ? Ces personnes sont-elles disponibles ?
5-Qu’en est-il des Camerounais à l’étranger, doivent-ils accepter de se voir refuser des postes de dirigeant parce qu’ils sont étrangers ?

Bref, j’aurai aimé lire que le député Jean Michel Nintcheu a introduit une loi qui permettra de former et préparer des personnes dans notre pays, à prendre sur la base de leur compétence et expérience, la relève des entreprises du pays. Seul, le critère de préférence nationale relève du protectionnisme et de la discrimination.

A l’heure ou on parle d’intégration sous-régionale, cette loi apparait tout simplement anachronique, mal pensée et « dead on arrival »
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4 commentaires:

Davy Pacome NZEKWA a dit…

Bonsoir Patrick,
L'article en question a attiré mon attention dans la presse camerounaise, et je trouve que de se poser la question de la camerounisation des postes, n'est pas illusoire, à condition de mettre les choses dans le bon sens:

- En général, c'est l'actionnaire majoritaire dans un capital, qui désigne le Directeur Général. Par conséquent, tant que la majorité du capital sera fourni par des étrangers, il ya des chances pour qu'ils mettent leur "frère" à la tête. Même le boutiquier sénégalais au coin de la rue met son frère à la caisse non, je ne parle pas du libanais et des chinois...

- Les entreprises para-publiques ont un statut assez spécial, et à ce moment c'est à l'Etat de désigner (par Décret Présidentiel) le Directeur Général. Après des exemples dramatiques, on est arrivé à conclure qu'un Camerounais serait plus tenté qu'un expatrié, en ce qui concerne la corruption, les marchés fictifs, etc. Mais l'on sait bien si on est honnête, que le diplôme ne saurait être le seul critère d'évaluation pour juger de la compétence de quelqu'un. Pas la peine de revenir sur les cas de brillants diplômés de grandes école qui ont fait un FLOP à la tête de grandes structures, puisque le diplôme est la présomption de compétence, et le rang, la preuve qu'on a bachoté mieux que les autres.

- Le poste de Directeur (et c'est encore plus vrai pour le Directeur Général) bien plus que la compétence technique, se joue sur le sens du contact (le fameux réseau), l'expertise en matière de résolution des conflits, de gestion de la pression, de l'anticipation, etc. Toutes choses qui découlent de l'expérience, de la maturité d'esprit et de l'intégrité de chacun.

Je ne pense pas qu'un voleur, payé même à 20 millions le mois, cesse de voler. Du coup je ne suis pas cartain que la question se pose dans le sens de la nationalité ou de la race. Il ya une floppée de camerounais qui dirigent de grosses multinationales à Londres, à Paris, à Johannesburg et ailleurs. Il ya des expatriés qui ont été de piètres managers au Cameroun, donc...

Peut-être que c'est finalement l'environnement, comme l'affirment les sociologues, qui fait de l'individu ce qu'il est.

Il ya donc certainement de meilleurs gestionnaires dans des entreprises qui définissent des besoins clairs avant de recruter, qui dressent des plans de carrière basés sur des évaluations liées à des objectifs clairs qui découle d'une vision partagée, qui respectent la méritocraie basée sur eperformances évaluées, qui mettent un point d'honneur à des contrôles/audits et aux sanctions qui devraient en découler.

Imposer des Camerounais à la tête de nos structures, serait déplacer le problème, car la compétence n'a pas de race, encore moins d'ethnie. La performance et la méritocratie résolvent les injustices, car les faits sont têtus, comme disent les comptables! Si l'Etat veut donner des postes de responsabilité à des fils et filles du pays, il doit assainir radicalement l'environnement, car pendant que certains rient des déboires de ceux qui sont pris par l'Epervier d'Etoudi, ils consultent leurs comptes remplis des sous des contribuables. Qui faut-il donc le plus plaindre?

PS: Ceci est un point de vue, et comme un éditorial, il a l'avantage de n'engager que moi.

Amicalement.
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Davy-Pacôme Nzekwa
Head of Human Resources & Administration
Geovic Cameroon Plc

Anonyme a dit…

Voilà comment les camerounais mènent le débat ! On parle du recensement. il été réalisé par le BUCREP ! Elecam n'a rien à y voir.

Pas de procès d'intention. On juge un maçon au pied du mur.

Anonyme a dit…

j'aurais du mal à parler d'opposition au Cameroun de même que de Journalistes. Nous avons quelques agitateurs nourrie par le gouvernement et quelques animateurs qui ont gagne pain d'alimenter la rumeur et servir de hautparleurs les querelles d'éléphants.

De plus, Je ne pense pas que pour les élections présidentielles, il sera nécessaire de faire quoi que ce soit.
Nous avons un parti bien organisé dont la base est mobilisée. Face à ce parti des sous partis de ce grand parti. Ces derniers n'existent que pour servir.
Mon constat et qui n'engage que moi bien sur, est le suivant : il n'existe pas d'opposition dans ce pays. Nous sommes dirigés par une bande de camarades de classe et de parti (UNC).
Lorsque leur chef (PBB) de classe leur (UPC, SDF, UDC, etc.) demande de faire un peu de bruit, ils le font. Lorsqu'il demande le calme, la classe se calme.

Martial Daz a dit…

lol..
Pour renchérir sur les propos de DPN, je dois préciser que le déficit de compétence n'est pas l'unique problème. En réalité, derrière cette idée du député, il ya la question du chômage de nos diplômés dont l'une des causes est la faible mobilité des hauts cadres nationaux dans les entreprises.
j'ai une sorte de contribution à apporter. A défaut d'interdire aux entreprises de recruter des DG "blancs" on pourrait faire comme en occident, cad taxer les entreprises relativement à leur taux de cadres nationaux employés.

Ce serait une politique fiscale intéressée, qui résoudrait plus d'un problème: le déficit budgétaire et le sous emplois des diplômés nationaux, notamment. Une des conséquences évidentes serait que le salaire versé au DG blanc (très souvent faramineux, comme à la CAMPOST) reviendrait in fine dans les caisses de l'Etat, au moins en partie.

pensez-y.

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