jeudi 29 avril 2010

Cameroun Recensement : Le chiffre oublié

Par Patrick N
Pendant que l’opposition Camerounaise s’insurge contre les résultats du recensement et que la presse fait écho aux contestataires, pendant que le gouvernement essaye de justifier ses résultats et d’expliquer maintenant ce qu’il aurait dû expliquer hier, un chiffre très important s’est glissé dans les résultats sans qu’on en fasse vraiment allusion.

Ce chiffre est +50% et ils représentent le pourcentage de Camerounais âgés de moins de 25 ans. Et de ces 50%, plus de 40% ont moins de 14 ans.

Concrètement ça veut dire que : 20% a 25% de la population Camerounaise se trouve dans la tranche d’âge [1,14[, et l'autre moitié dans la tranches [14, 25[et le reste des 50% dans la tranche [25, 51,1[- en supposant que l’espérance de vie au Cameroun est de 51,1 ans.

Avant quatorze ans, la plupart sont encore des écoliers insouciants, innocents et fragiles. A cet âge, ils ont besoin de tendresse, de s’épanouir et de rêver ; C’est aussi l’âge où l’essentiellement de leur instruction se fera, l’âge où ils acquerront les habitudes qui définirons leur altitude dans la société ; C’est dans cette tranche d’âge que l’on bâtit le Cameroun de demain, c’est dans cette tranche d’âge qu’on crée un Cameroun nouveau futur ; c’est dans cette tranche d’âge que l’espoir repose.

Ce qui fait mal, c’est qu’une fois de plus, cette tranche d’âge est passée inaperçue. Comme si parce qu’elle ne peut voter aux élections alors elle ne comte pas : On ne la courtise pas, on l' accorde presqu’aucune attention ; On la regarde comme un fardeau, on la regarde comme inexistante. Pourtant, c’est en elle que repose l’espoir, pourtant c’est elle qui tiendra nos béquilles aux crépuscules de nos vies.

Si la jeunesse est le fer de lance de nation comme disait Paul Biya, alors le fer de la nation grandit rouillé : Il grandit rouillé par l’incertitude du lendemain, il grandit rouillé par la famine qui tenaille le ventre avant et après les classes ; il grandit rouillé de l’inaccessibilité aux soins primaires de santé ; il grandit rouillé d’être abusé et exploité par les adultes et parents ; il grandit rouillé par le manque d’activité et le manque d’épanouissement ; il grandit rouillé de constater qu’au Cameroun, la jeunesse ne compte pas.

Nous pouvons prendre les cinq prochaines années, à contester sans preuve les résultats du recensement. Mais dans cinq ans, les moins de quatorze ans frapperont aux portes de nos universités, dans cinq ans, les moins de quatorze ans demanderont qu’on se prépare à leur faire une place dans la société.

Et comme de manière fatidique, dans cinq ans, ceux qui lisent cette article aujourd’hui, sont ceux-là qui auront la charge d’offrir à ces moins de quatorze ans, une place dans la société. Dans cinq ans, c’est vous qui serez les responsables, non pas l’opposition, ni la presse et encore moins Paul Biya et son régime : seulement vous.

Allons-nous laisser des gens qui ont largement passé l’espérance de vie au Cameroun, façonner le futur dans lequel nous et nos enfants vivront quand on sait qu’elle est leur palmarès ? Allons-nous comme des moutons, se laisser mener à l’abattoir sur le prétexte que nous suivions le berger en qui nous avions confiance? Nous pouvons tenir Paul Biya ou autre pour responsable aujourd’hui, mais demain, nous serons les seuls bouc-émissaires, nous serons les seuls responsables.

Si nous ne militons pas et ne bâtissons pas pour les moins de quatorze ans aujourd’hui, demain ils auront la même degré acrimonie pour nous que celui que nous avons pour nos dirigeants aujourd’hui ; demain, ils trouveront inconcevable que nous n’ayons pas pensé à organiser et planifier un avenir pour eux.

Certains se demandent certainement où est-ce qu’on commence, on commence par s’intéresser et se mettre au courant de ce qui se passe au pays ; on commence par réagir à cette article, donner et faire entendre son opinion ; on commence par encourager le débat contradictoire ou pas, pour engager nos amis (es) et connaissance dans la conversation. Simplement, on commence en se manifestant.

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6 commentaires:

F.M a dit…

Excellent Patrick.
Nous sommes les futurs responsables de la jeunesse d'aujourd'hui, et si nous ne prenons pas les rênes, notre échec sera bien pire que celui de nos parents.

J'ai lu chacune de tes réactions sur le kto groupe, et comme les autres je t'encourage à écrire et de continuer d'encourager le débat d'idée, attirer l'attention sur certains sujets.

Nous devons absolument nous manifester, en lisant, je me rends compte combien nous sommes absent dans notre pays, on arrive à peine à repérer les 25 ans et plus en dehors de dans les bars.

Nous devons, si nous voulons sauver ce qu'il reste, change de cap. Il n'ya pas d'espoir pour le Cameroun sans un réveille des 25 ans et plus, il n’ya pas d’espoir pour le Cameroun tant que dans un pays ou plus de 40% de la population a moins de 25 ans, on trouve plus de bars que de bibliothèques.

Merci et fin de journée.

Anonyme a dit…

Là, je suis tout à fait d'accord avec toi, pour une fois! c'est peut-être le seul pourcentage qui n'est pas biaisé, même si çà reste une perception.
Je crois d'ailleurs que la seule richesse du Cameroun, c'est sa jeunesse, quel que soit l'état dans lequel elle se trouve actuellement. "Quand la jeunesse camerounaise se réveillera..." Parodions ainsi ce qui se disait de la Chine il n'y a que deux décennies et qui est devenu une réalité implacable...

Anonyme a dit…

Ce chiffre n'a pas été oublié, du moins par le gouvernement. Les programmes gouvernementaux (et leurs documents projets) en tiennent compte depuis une dizaine d'années environ.

Mais on peut fair mieux c'est vrai
Luc

James MBAH a dit…

C'est très intéressant de relever ce point, Patrick. Ceci nous amène à constater qu'au fond, si rien n'est fait, ou du moins engagé, la jeunesse camerounaise pourrait entrer dans un cycle infernal.

Entre les années 70 et 80, pas grand chose n'avait été initié pour développer les ressources (certes abondantes à cette période) dont disposait alors le Cameroun. Le secteur productif a continué a être dominé par quelques entreprises publiques, le système éducatif n'a pas eu une orientation professionnelle avérée et l'université n'a continué à cibler que les concours administratifs. Résultat, les ressources que l'on croyait abondantes se sont amenuisées, du fait d'une croissance impressionnante de la population active (les moins de 14 ans d'alors étant devenus adultes).

La conclusion à laquelle on parvient malheureusement est que très peu d'initiatives ont été initiées en faveur des jeunes de moins de 14 ans à l'époque.

Je crois que c'est à ce niveau que Patrick voudrait nous interpeller. A mon avis, je pense que nous devons retenir les leçons du passé, pour éviter que l'histoire (pas très glorieuse) des jeunes de 25-40 ans ne se répète. Quelques voies sont à explorer à cet effet:

- Pour nous les adultes d'aujourd'hui, il faudrait nous efforcer d'être un modèle pour nos enfants et petits frères. Les palmarès du nombre de bouteilles d'alcool vidées en une soirée, du nombre de conquêtes féminines menées avec succès en une semaine, sont à proscrire. Le "fey-man" devrait cesser d'être un modèle de réussite, ni ceux qui vont en Occident sans but clair et précis et reviennent mener un train de vie ostentatoire. Cultiver chez nous-même les valeurs de l'effort et du travail et les susciter chez nos jeunes frères.

- Pour nos dirigeants, mettre en œuvre les voies et moyens permettant aux PME de jouer véritablement leur rôle (création de richesse, d'emploi, soutien de l'économie locale, etc.) et faciliter l'investissement (la réduction des formalités administratives et du délai de création de l'entreprise initiée il y a peu constitue déjà un grand pas dans ce sens). Améliorer le système éducatif en le centrant sur la créativité, la prise d'initiative et non sur une prise en charge future par l'Etat (concours administratifs). Faire de nos villes non plus seulement des centres administratifs, juridiques, militaires et commerciaux, mais aussi et surtout des centres culturels (bibliothèques, musées, aires de jeux, divertissement, relaxation, etc.) afin de promouvoir l'épanouissement du corps et de l'esprit.

Voilà les clés que je propose pour une fortune meilleure des moins de 14 ans et merci encore Patrick.

Anonyme a dit…

bonjour juste une remarque
le calcul que vousfaites n'est pas juste mais cela n'enleve en rien la pertinence de votre propos.
on dit 50% de la population a moins de 25 ans et parmi ces 50%, 40% ont moins de 14 ans. ça veut dire dans l'ensemble de la population, on a environ 20 à 25 % qui ont entre 1 et 14 ans.
au lieu de 40% comme vous le dites.
cordialement

Africa a dit…

Merci, très bonne remarque.

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